Lors du dernier jour des audiences de confirmation des charges du chef rebelle congolais Bosco Ntaganda qui se tiennent devant la Cour pénale internationale (CPI), ses avocats ont déclaré aux juges que les charges retenues à son encontre étaient fondées sur des « informations erronées ».
L’avocat de la défense Marc Desalliers a indiqué qu’il n’était pas exact que M. Ntaganda avait violé un témoin anonyme de l’accusation.
Il a également a soutenu qu’une vidéo filmée en novembre 2002, que tant l’accusation que la défense ont présentée comme élément de preuve, montrait que les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC) instauraient la paix et n’agressaient pas les civils.
Ntaganda était le sous-chef d’état-major des FPLC, que les procureurs accusent d’avoir perpétré des attaques obéissant à des motivations ethniques sur les civils de la province d’Ituri, au Congo.
Hier, le procureur Nicole Samson a déclaré que les images vidéo étaient de la propagande politique primaire destinée aux puissances étrangères. Elle a ajouté que le journaliste qui interviewait les dirigeants du groupe et les habitants de Mongbwalu provenait d’une station radio locale, Kandip, contrôlée à l’époque par le groupe rebelle.
« L’affirmation de la station radio est inexacte. Le journaliste venait d’Ouganda et travaillait pour la radio ABC », a raconté aujourd’hui M. Desalliers.
Les audiences de confirmation des charges ont débuté lundi, cette semaine, avec les éléments de preuve soumises par l’accusation pour les cinq chefs de crimes contre l’humanité et les treize chefs de crimes de guerre.
Les crimes, notamment le viol, l’esclavage sexuel, le pillage, le meurtre et l’utilisation d’enfants soldats, auraient été commis en 2002 et 2003.
Les procureurs arguent que M. Ntaganda donnait directement des ordres à ses troupes majoritairement hema pour brutaliser la population lendu et que les crimes ont été encouragés par sa « perpétration directe » de crimes, notamment le meurtre et le viol.
L’accusation a déclaré de plus que M. Ntaganda avait abattu le prêtre de la paroisse de Mongbwalu et avait ordonné à ses gardes du corps de violer trois femmes qui étaient retenues captives dans l’appartement où il résidait.
Aujourd’hui, les avocats de la défense ont dépeint M. Ntaganda comme un artisan de la paix chaudement accueilli par les habitants d’une ville assiégée par une milice ethnique meurtrière.
La défense a déclaré que les opérations de combat des FPLC visaient les milices rivales qui avaient agressé les civils, forçant un grand nombre d’entre eux à fuir leur maison. Ils ont indiqué que la mission du groupe était de restaurer la paix dans la zone et que la composition du groupe, y compris au plus haut niveau, était ethniquement diversifiée.
À la fin de l’audience, la juge présidente Ekaterina Trendafilova a donné à l’accusation et aux avocats des victimes jusqu’au 7 mars pour déposer des conclusions écrites abordant les questions débattues pendant ces audiences qui ont duré cinq jours. La défense a jusqu’au 4 avril 2014 pour soumettre ses conclusions. Les juges rendront leur décision dans les 60 jours suivant la réception des conclusions finales de la défense.
Les juges disposent de l’option de confirmer les charges s’il existe suffisamment d’éléments de preuve pour que l’affaire soit jugée. Ils peuvent également refuser de confirmer les charges si les éléments de preuve de l’accusation sont considérées comme insuffisants.
Les juges ont une troisième possibilité, à savoir de demander à l’accusation de fournir des éléments de preuve complémentaires, de mener d’autres enquêtes ou de modifier les charges pour lesquelles les éléments de preuve soumis semblaient établir qu’un crime autre que ceux imputés a été perpétré.
La CPI a émis son premier mandat d’arrêt à l’encontre de M. Ntaganda en 2006. Il a été accusé, avec Thomas Lubanga, le chef de la branche politique du groupe connue sous le nom d’Union des patriotes congolais (UPC), d’enrôlement, de conscription et d’utilisation d’enfants soldats.
Toutefois, alors que les autorités congolaises ont transféré M. Lubanga à La Haye et qu’il est devenu la première personne à être jugée devant la Cour, M. Ntaganda est resté libre jusqu’à ce qu’il se soit rendu volontairement l’année dernière.