La milice de Bosco Ntaganda avait pris quelques mesures pour démobiliser des enfants soldats en 2003, selon le témoignage entendu aujourd’hui de la part d’une fonctionnaire qui avait travaillé avec les Nations unies pour mettre fin à l’utilisation d’enfants soldats par les groupes armés au Congo.
Kristine Peduto, qui était un fonctionnaire pour la protection de l’enfance au Congo entre 2002 et 2005, a déclaré au procès Ntaganda qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI) que l’Union des patriotes congolais (UPC) avait émis un communiqué pour démobiliser les enfants soldats et avait libéré certains enfants peu après.
« Le lendemain de la réunion [avec les chefs de l’UPC], nous avons entendu un communiqué de démobilisation sur Radio Kandip », a rappelé Mme Peduto, qui témoignait pour sa deuxième journée au procès Ntaganda. Elle a indiqué que, à la suite de la réunion, un nombre « non connu » d’enfants avait été libéré de la milice. Le groupe, dans lequel M. Ntaganda a été chef adjoint de l’état-major, n’avait toutefois pas mis en place de mesures appropriées pour désarmer, démobiliser et réintégrer les enfants libérés dans leur communauté, a déclaré Mme Peduto.
Lors de la réunion entre les fonctionnaires de l’ONU et les chefs de la milice, Mme Peduto a vu « un très jeune enfant soldat » parmi les gardes armés du chef de l’UPC, Thomas Lubanga. Elle n’a pu dire l’âge exact de cet enfant soldat.
Ntaganda est jugé pour 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, dont le viol et l’esclavage sexuel d’enfants soldats, l’enrôlement et la conscription d’enfants soldats de moins de 15 ans ainsi que leur utilisation pour prendre part activement à des hostilités. Les crimes auraient été commis au Congo en 2002 et 2003.
Mme Peduto a également indiqué que bien que beaucoup de groupes armés usaient de violence sexuelle, les soldats de l’UPC n’étaient responsables que des viols documentés par son équipe dans les villes de Bunia et de Sayo. « Nous avons entendu des témoignages qui se référaient constamment au fait que les soldats et les officiers de l’UPC étaient responsables de violence sexuelle. Nous pensions que cela n’avait pas eu lieu par hasard ; il y avait trop d’incidents pour qu’il ne s’agisse que de cas isolés », a précisé Mme Peduto, qui travaille actuellement en tant que responsable de la protection des enfants au Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF).
Dans un incident documenté en juin 2003, une fille de 14 ans avait été violée « plusieurs fois » par cinq soldats de l’UPC après qu’ils aient pillé la maison de ses parents. Le mois suivant, il y a eu deux rapports sur des viols dont un concernait un fille de 15 ans.
« Les viols ont-ils été portés à l’attention de l’UPC ? », a interrogé le substitut du procureur Julieta Solano.
« Oui, je suis sûre qu’ils l’ont été », a répondu Mme Peduto, qui a ajouté avoir envoyer à l’UPC les rapports documentant différentes préoccupations concernant les droits de l’homme et la sécurité. Les rapports avaient été adressés à M. Lubanga.
Mme Peduto a déclaré que la question de la violence sexuelle ainsi que les préoccupations relatives aux enfants soldats, aux disparitions et aux meurtres avaient été également soulevées lors d’une rencontre de haut niveau avec tous les groupes armés. Pour l’UPC, la réunion présumée aurait eu lieue à la résidence de M. Lubanga dans la ville de Muzipela. C’est après cette rencontre que le groupe avait émis un ordre de démobilisation sur une station de radio locale.
Mme Peduto poursuivra son témoignage demain matin.