Bosco Ntaganda réclame la levée des restrictions sur ses communications et contacts imposées dans le centre de détention de la Cour pénale internationale (CPI). Depuis mars 2015, l’ancien chef rebelle congolais est limité à une heure par semaine d’appels téléphoniques surveillés. Il a l’autorisation de parler à ses enfants par le biais de sa femme et il peut enregistrer des messages destinés à ses sept enfants après que leur contenu ait été examiné pat le Greffe de la Cour.
Le 8 septembre, M. Ntaganda a entrepris une grève de la faim pour protester contre la décision des juges de première instance de maintenir les restrictions qui lui avaient été imposées l’année dernière lorsque les juges avaient conclu qu’il existait des motifs raisonnables de croire qu’il s’était engagé personnellement dans une subornation de témoins et qu’il avait poussé ses complices à le faire.
Afin de conserver ces restrictions, les juges ont décidé que, puisqu’il restait plus de 50 témoins de l’accusation à entendre et compte tenu des préparatifs pour la plaidoirie de la défense, le risque de pressions sur les témoins et de préparation des témoins restait élevé. En signe de protestation, le témoin avait débuté une grève de la faim et avait refusé d’assister aux audiences pendant deux semaines. Il a stoppé son boycott des audiences après que les fonctionnaires de la Cour aient organisé une visite de sa femme pendant huit jours dans des conditions qu’il a estimé acceptables.
La défense a actuellement porté l’affaire devant les juges d’appel pour demander l’arrêt des restrictions. Les avocats de la défense ont suggéré que, comme mesure provisoire minimum, le temps d’appels téléphoniques attribué à M. Ntaganda par semaine soit augmentée à deux heures mais toujours sous une surveillance active de la part des fonctionnaires de la Cour.
Avec les restrictions imposées à M. Ntaganda l’année dernière, ses communications téléphoniques ne sont permises qu’avec deux personnes, elles sont activement surveillés et limitées dans leur durée, dans les langues parlées, les sujets abordés et il est interdit d’utiliser un langage codé pour discuter des questions relative au procès en cours.
Dans l’appel, l’avocat principal de la défense Stéphane Bourgon affirme que la poursuite des restrictions n’est pas « nécessaire et proportionnée » à l’objectif annoncé par la Chambre de première instance de garantir la sécurité des témoins, d’empêcher les violations de la confidentialité et d’assurer l’intégrité de la procédure.
Me Bourgon a déclaré que les allégations des témoins selon lesquelles ils avaient été menacés longtemps après que M. Ntaganda ait été soumis à une surveillance active ne constituaient pas des motifs raisonnables pour poursuivre les restrictions. Il a ajouté que, de plus, les juges « avaient conclu de manière erronée qu’il existait des motifs raisonnables de penser qu’il avait une possibilité de subornation de témoin à l’initiative de M. Ntaganda ». Il a nié que M. Ntaganda ait joué un rôle dans les pressions exercées sur les témoins ou dans la divulgation de l’identité des témoins alors qu’il était sous surveillance.
Entretemps, l’accusation a demandé aux juges d’appel de conserver les restrictions, les qualifiant de légales, nécessaires et proportionnées car M. Ntaganda a violé à la fois les ordonnances de la chambre et le règlement du centre de détention. Il a ajouté : « En effet, la conduite répréhensible de M. Ntaganda et la menace continue qu’il représente pour la sécurité des témoins, la confidentialité des informations et l’intégrité de la procédure, démontrent que les restrictions sur ses contacts sont autant indispensables aujourd’hui qu’elles l’étaient lorsqu’elles ont été imposées la première fois ».
L’accusation a également affirmé que l’appel de M. Ntaganda minimisait la gravité et l’ampleur généralisée de l’intimidation présumée des témoins qui avaient mené aux restrictions. L’appel « suggère à tort » que l’évaluation de la chambre aurait dû être limitée aux deux témoins dont l’identité a été divulguée par M. Ntaganda et qui se sont présentés à la barre, pourtant les allégations de pressions exercées sur les témoins vont « largement » au-delà de ces deux témoins et touchent à la fois les témoins de l’accusation et de la défense.
Les juges devraient se prononcer sous peu sur l’appel. M. Ntaganda est jugé devant la CPI depuis septembre 2015 pour 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
Les audiences du procès ont repris aujourd’hui après une pause de trois mois, avec la déposition du témoin P-976, qui s’est déroulée en grande partie à huis clos.