L’avocat de l’accusé de crimes de guerre Bosco Ntaganda a remis en cause les procureurs de la Cour pénale internationale (CPI) pour ne pas avoir respecté le protocole de la Cour dans la préparation des témoins lorsqu’ils avaient travaillé avec une personne qui apporte cette semaine son témoignage contre l’ancien chef rebelle congolais.
L’avocat de la défense Christopher Gosnell a porté cette accusation par rapport au traitement d’une personne portant le pseudonyme de témoin P300 attribué par la Cour et qui s’est présenté à la barre hier matin puis qui a conclu son témoignage cet après-midi. Bien que la déposition de ce témoin ait été entendue à huis clos afin de ne pas divulguer son identité au public, l’audience s’est déroulée pendant quelques brefs instants en public. C’est lors de ces séances publiques que l’avocat de la défense a critiqué la manière dont le Bureau du Procureur, dénommé également BdP, avait donné des instructions au témoin P300.
Le témoin P300 est le 52 ème témoin à comparaître pour l’accusation.
Avant que le témoin ne se présente devant les juges, les avocats de M. Ntaganda ont contesté la manière dont l’accusation l’avait préparé lorsqu’il était arrivé à la Cour pour témoigner. Me Gosnell a affirmé que les procureurs avaient « violé » le protocole de préparation des témoins en « outrepassant l’exercice légitime d’éclaircissement » de la déclaration enregistrée antérieurement du témoin P300. Me Gosnell a déclaré que le témoin avait été interrogé pour « commenter des événements factuels » auxquels il n’avait pas assisté. Par conséquent, l’avocat de la défense a demandé aux juges d’ordonner à l’accusation de communiquer l’enregistrement vidéo de la préparation du témoin. De plus, la défense a demandé aux juges d’ordonner que, dans son interrogatoire du témoin, l’accusation n’utilise pas d’éléments non divulgués aux avocats de M. Ntaganda.
Les juges ont cependant conclu que la manière dont la séance préparatoire avait été menée était « conforme au champ d’application autorisé » et que les questions posées par l’accusation « semblaient porter » sur la déclaration du témoin. Les juges ont déclaré que le journal de la préparation du témoin communiqué à la défense était « très détaillé » et donnait une idée claire du déroulement de la préparation.
« La chambre remarque que l’accusation est intervenue pour que le témoin se concentre et, par conséquent, la chambre conclut que la divulgation de la vidéo n’est pas justifiée », a affirmé le juge président Robert Fremr dans une décision orale. Il est difficile de savoir quel était le sujet du témoignage du témoin P300, puisque son témoignage a été apporté presqu’exclusivement dans des séances non publiques.
Ntaganda est jugé pour cinq chefs de crimes contre l’humanité : meurtre et tentative de meurtre, viol, esclavage sexuel, persécution et transfert forcé de population. II est également accusé de treize chefs de crimes de guerre : meurtre et tentative de meurtre; attaque contre des civils; viol, esclavage sexuel de civils; pillage; déplacement de civils; attaques contre des biens protégés; destruction des biens de l’ennemi; viol, esclavage sexuel d’enfants soldats; enrôlement et conscription d’enfants soldats âgés de moins de quinze ans et leur utilisation pour les faire participer activement à des hostilités.
Les crimes présumés auraient été commis pendant son mandat de chef adjoint de l’état-major des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), la branche armée de l’Union des patriotes congolais (UPC) dirigée par Thomas Lubanga. M. Ntaganda et les combattants du groupe auraient perpétré des atrocités dans la province congolaise d’Ituri lors du conflit ethnique qui s’est déroulé en 2002 et 2003.
Les audiences du procès se poursuivront demain matin avec le témoignage d‘un autre témoin de l’accusation se présentant sous le pseudonyme de témoin 883.