Bosco Ntaganda tente de contester le mandat de la Cour pénale internationale de le juger pour les viols d’enfants soldats perpétrés dans sa milice auprès de la Chambre d’appel de la Cour après que les juges aient affirmé qu’ils le jugeraient sur la base de ces charges.
L’appel a été déposé conformément à l’article 82(1)(a) de l’acte fondateur de la Cour, le Statut de Rome, qui prévoit qu’une partie à un procès peut faire appel d’une décision en ce qui concerne la compétence de la Cour. M. Ntaganda est, depuis septembre 2015, jugé pour 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Il ne conteste le mandat de la CPI à le juger que pour deux de ces chefs d’accusation.
Dans un avis d’appel du 10 janvier 2017, l’avocat de la défense Stéphane Bourgon a demandé aux juges d’appel de déclarer que la Chambre de première instance n’était pas compétente pour juger M. Ntaganda pour les crimes de guerre présumés de viol et d’esclavage sexuel des enfants soldats au sein de l’Union des patriotes congolais (UPC) par les combattants de la même milice. À titre subsidiaire, la défense a demandé à la Chambre d’appel de renvoyer l’affaire devant la Chambre de première instance après avoir donné des instructions et des informations supplémentaires sur l’interprétation de l’article du Statut de Rome en vertu duquel M. Ntaganda a été accusé des deux chefs contestés.
Plus tôt dans l’année, les juges de première instance avaient décidé que la CPI avait le mandat de juger l’ancien chef rebelle congolais pour ces charges. Ils ont conclu qu’il n’est pas exclu que les membres d’une même force armée soient des victimes potentielles des crimes de guerre de viol et d’esclavage sexuel, en raison de la manière dont ces crimes ont été incorporés au Statut de Rome ou sur la base du droit international humanitaire.
En contestant la compétence de la CPI pour les deux affaires, la défense a a soutenu que, en vertu de l’article 3 des Conventions de Genève de 1949, les crimes de guerre ne pouvaient pas être commis par des membres d’une force armée contre des membres de la même force armée. Elle a allégué que la victime d’un crime de guerre dans un conflit armé non international devait être une personne protégée au sens de l’article 3, à savoir une personne « ne participant pas directement aux hostilités ». La défense a également suggéré que ces crimes pouvaient être érigés en infraction pénale et punis localement comme tous les autres crimes commis par des soldats à l’encontre d’autres membres de la même force.
L’accusation soutient que M. Ntaganda, en tant qu’ancien chef adjoint de l’état-major de l’UPC, est pénalement responsable du viol et de l’esclavage sexuel des enfants soldats appartenant à la milice commis par leurs commandants et soldats.
La défense, invoquant la complexité de l’appel et la charge de travail considérable dans le procès en cours, a demandé aux juges une prolongation d’une semaine jusqu’au 27 janvier pour soumettre son document à l’appui de l’appel. Elle a fait valoir que l’appel portait sur « un domaine du droit intrinsèquement complexe »relatif à la compétence de la Cour en ce qui concerne deux affaires et l’interprétation correcte de l’article 8 du Statut de Rome. La défense a ajouté que la question « était non seulement importante pour étendre la portée de l’affaire Ntaganda mais il était probable qu’elle aurait également des ramifications pour d’autres affaires ».
La juge Christine Van den Wyngaert, qui est la présidente de la Section des appels, a nommé la juge Sanji Mmasenono Monageng en tant que présidente.