Bosco Ntaganda se présentera à la barre des témoins le mois prochain pour témoigner pour sa propre défense lors de son procès qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI). Selon ses avocats, le témoignage de l’ancien chef rebelle congolais pourrait durer jusqu’à six semaines.
Dans une interview donnée aujourd’hui à International Justice Monitor, l’avocat de la défense Stéphane Bourgon a expliqué les raisons pour lesquelles M. Ntaganda avait décidé de se présenter à la barre, contrairement à la plupart des autres personnes qui ont été jugées devant la CPI.
« M. Ntaganda souhaite démontrer par lui-même qu’il n’est pas la personne décrite dans les médias ou ailleurs. Il veut montrer qui il est, ce qu’il a fait et les raisons pour lesquelles il a agit », a déclaré Me Bourgon. Il a ajouté que M. Ntaganda s’était rendu volontairement à la Cour et qu’il voulait affronter la justice pour rétablir sa réputation.
Ntaganda, l’ancien chef adjoint de l’état-major de l’Union des patriotes congolais (UPC), une milice, s’est rendu à l’ambassade des États-Unis de Kigali, au Rwanda, en mars 2013 et a demandé à être transféré à La Haye. Jusqu’à ce qu’il se soit rendu, il avait échappé à deux mandats d’arrêt, le premier ayant été émis en août 2006 et le second en juin 2012.
« Selon toute vraisemblance, il témoignera avant les vacances d’été de la Cour et il débutera sa comparution la semaine du 12 juin », a déclaré Me Bourgon. « Nous en discutons mais il est probable qu’il témoignera pendant une certaine durée. Nous pensons que nous aurons besoin de six semaines ».
Le début de la présentation des moyens de la défense est prévu pour le 29 mai avec les déclarations liminaires et le témoignage de trois témoins de la défense : D54, D52 et D210. Une pause sera ensuite observée jusqu’à la semaine du 12 juin, lorsque M. Ntaganda débutera son témoignage. Dans une demande aux juges déposée le 12 mai 2017, Me Bourgon a soutenu que permettre à M. Ntaganda de témoigner le plus tôt possible raccourcirait la présentation des moyens de la défense.
Les avocats de M. Ntaganda sont toutefois mécontents que les juges aient ordonné le début de la présentation des moyens de la défense avant de statuer sur différentes importantes requêtes en cours. « De notre point de vue, cette affaire ne devrait se poursuivre », a déclaré Me Bourgon lors d’un entretien donné à International Justice Monitor. « À notre avis, il y a eu abus de procédure et ce procès devrait s’arrêter ».
Les juges n’ont pas encore statué sur la demande de la défense de faire appel de la décision rejetant la requête de M. Ntaganda de suspendre le procès. La défense souhaite que le procès s’arrête car l’accusation aurait eu accès à des informations cruciales de la défense, notamment à l’identité de témoins potentiels et à la stratégie de défense de l’accusé. Les juges ont toutefois décidé le 28 avril qu’il était possible de continuer à mener un procès équitable pour l’accusé. Les avocats de M. Ntaganda ont déposé une demande visant à obtenir l’autorisation d’interjeter appel de cette décision.
De même, les juges n’ont pas encore statué sur une demande de la défense visant à déposer une demande d’acquittement partiel, dans laquelle M. Ntaganda déposerait une demande de non lieu pour certaines des charges pour lesquelles il est jugé.
Ntaganda nie l’ensemble des 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité dont il est accusé et que les procureurs affirment avoir été commis en 2002 et 2003 par lui-même et par les autres soldats de l’UPC.
Il a, de plus, remis en cause la compétence de la CPI d’entendre les chefs six et neuf retenus à son encontre en vertu desquels il est accusé des crimes de guerre présumés de viol et d’esclavage sexuel d’enfants soldats de l’UPC par des combattants du même groupe. La Chambre d’appel n’a pas encore statué sur cet appel. « Il s’agit d’une question importante qui devrait être tranchée avant que la présentation des moyens de la défense ne commence », a fait remarquer Me Bourgon.
La présentation des moyens de l’accusation a commencé en septembre 2015 et s’est conclue fin février 2017. Pendant cette période, 71 témoins ont été appelés pour témoigner à l’encontre de M. Ntaganda. Les juges ont également entendu le témoignage de trois victimes tandis que cinq autres victimes ont présenté leurs vues et préoccupations à la Chambre de première instance.