Pour son deuxième jour de témoignage devant la Cour pénale internationale (CPI), l’ancien chef rebelle congolais Bosco Ntaganda a déclaré aux juges qu’il avait quitté l’armée rwandaise pour rejoindre une insurrection armée en République démocratique du Congo car il souhaitait contribuer à la chute de la dictature dans ce pays.
M. Ntaganda a indiqué que sa motivation pour rejoindre l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) s’est trouvée confortée lorsque des citoyens congolais du groupe ethnique Tutsi, auquel il appartient, ont été la cible de meurtres et de déplacement. Il a raconté ses souvenirs d’instructeur militaire au sein des rebelles de l’Armée patriotique du Rwanda (APR), son incorporation au sein de l’armée nationale du Rwanda après que l’APR ait pris le contrôle de Kigali et comment il avait ensuite rejoint l’AFDL et aidé à renverser le dictateur congolais Mobutu Sese Seko.
L’ancien commandant rebelle a témoigné jeudi que, lorsque l’APR avait pris le pouvoir au Rwanda, l’armée renversée et sa milice alliée dénommée Interahamwe, qui avait commis le génocide rwandais, avaient fui au Congo. Dans ce pays, ils avaient participé à une campagne soutenue par le gouvernement de Mobutu pour tuer les Tutsis. Il a déclaré que la campagne avait forcé des milliers de Tutsis à fuir le Congo, surtout pour le Rwanda et l’Ouganda, et que ceux qui n’avaient pas réussi à s’échapper avaient été « exterminés » essentiellement par des anciens soldats du régime renversé du Rwanda.
« Je souhaitais vraiment rejoindre le mouvement rebelle et chasser ce dictateur … Ils voulaient chasser les Tutsis de Kivu et les [autres] personnes voulaient reprendre cette partie du pays », a indiqué M. Ntaganda.
« Ce n’était pas la paix. Lorsque j’étais au Rwanda, je voulais que le Congo soit libéré. C est pourquoi, lorsque je faisais partie de l’AFDL, je n’ai pas demandé de salaire. Mon objectif était de libérer le pays », a-t-il ajouté. M. Ntaganda a expliqué que le fait de renverser Mobutu permettrait aux réfugiés de se réinstaller dans leurs maisons et de vivre en paix, avec des enfants en mesure de se rendre à l’école et que ceux qui avaient besoin de soins médicaux auraient accès à des hôpitaux.
Il a affirmé que, peu après que l’AFDL ait pris le pouvoir au Congo, le nouveau gouvernement avait eu des différends avec ses partisans rwandais et ougandais à la suite desquels il avait émis un communiqué selon lequel tous les Tutsis et toutes les personnes qui ressemblaient aux Tutsis devaient être tués. « Ils étaient considérés comme de la vermine. Et ces gens que nous avions aidé ont fait volte fac et étaient contre nous », a-t-il déclaré.
Après cette opposition, M. Ntaganda s’était retiré avec les armées ougandaise et rwandaise vers l’est du Congo et avait commencé une campagne pour renverser le nouveau gouvernement du Congo qu’ils avaient aidé à prendre le pouvoir.
M. Ntaganda répond de 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité devant la CPI, qui comprennent le meurtre, le viol, l’esclavage sexuel, le pillage et l’utilisation d’enfants soldats. Les crimes auraient été commis en 2002 et 2003 dans des villes dont Kobu et Mongbwalu alors qu’il exerçait les fonctions de chef adjoint de l’état-major dans l’Union des patriotes congolais. À l’époque, le groupe faisait partie des nombreuses milices participant au conflit ethnique qui s’était déroulé dans le district de l’Ituri.
Au début de son témoignage d’hier, M. Ntaganda a parlé de sa naissance au Rwanda, de sa scolarité au Congo ainsi que de sa motivation de rejoindre l’APR. Aujourd’hui, il a défendu sa réputation de soldat discipliné et de commandant et a proclamé son innocence pour les charges retenues à son encontre : « Moi, Ntaganda, je ne suis coupable de rien. Il n’y a rien dont je me sente coupable. Je ne suis pas un criminel, je suis un révolutionnaire ».
Son témoignage se poursuivra vendredi.