Bosco Ntaganda a déclaré mercredi aux juges de la Cour pénale internationale (CPI) qu’il avait interdit les relations sexuelles entre les membres de l’Union des patriotes congolais (UPC) et que la politique était respectée par l’ensemble des troupes.
« À chaque réunion avec des recrues, je disais aux recrues de sexe masculin qu’elles ne pouvaient pas coucher avec les recrues de sexe féminin. C’était interdit », a indiqué M. Ntaganda, qui témoignait pour sa propre défense.
L’ancien commandant de haut rang de l’UPC a affirmé que, lors de son discours aux recrues, il avait souligné que puisque la raison pour laquelle ils avaient rejoint le groupe était la protection des civils, aucune combattante n’était autorisée à tomber enceinte ou à avoir des relations sexuelles avec un autre combattant. Ce message a été « répété à plusieurs occasions et il a été respecté », a-t-il dit.
Interrogé par l’avocat de la défense Stéphane Bourgon sur la manière qui lui permettait de savoir que la politique était respectée, M. Ntaganda a répondu : « Aucun incident lié à une grossesse n’est survenu ou a été signalé, par conséquent les instructions ont été suivies à la lettre ».
Me Bourgon a ensuite interrogé M. Ntaganda sur la politique de l’UPC concernant le viol. « Cela faisait aussi partie de mes instructions. Aucun homme ou aucune femme n’était autorisé à coucher avec une personne du sexe opposé sans son consentement », a déclaré M. Ntaganda. « Cela n’était absolument pas accepté ».
Ntaganda a raconté deux cas de tentative de viol qui avait été signalés au camp d’entraînement du groupe implanté à Mandro. Dans un des cas, un officier dénommé Brandon qui avait tenté de commettre un viol avait été « arrêté et puni ». Le second cas de tentative de viol impliquait un des gardes du corps de sexe féminin de M. Ntaganda. « Je l’ai arrêté et battu devant mes troupes », a déclaré M. Ntaganda.
Il a déclaré qu’il y avait quatre gardes du corps de sexe féminin dans son escorte personnelle et parmi les fonctions qui leur étaient assignées figurait celle d’aider sa femme à s’occuper de sa maison. M. Ntaganda a affirmé que les quatre gardes du corps de sexe féminin étaient armés et « heureux de le servir » car « ils l’aimaient ».
« Pourquoi avez-vous choisi quatre femmes militaires pour votre domicile ? », a demandé Me Bourgon.
« Le choix [des gardes du corps] a été fait par le chef d’escorte. Il les a sélectionné parmi ses soldats et les a assigné », a répondu M. Ntaganda.
Il a indiqué que les quatre femmes militaires étaient âgées de 18 ans et plus. Interrogé pour savoir comment il déterminait leur âge, M. Ntaganda a répondu qu’elles avaient rempli les critères de présélection appliqués dans le camp. Ils comprenaient une évaluation visuelle ainsi que l’accomplissement de tâches, comme porter une arme et une boîte de munitions.
« Y a-t-il un lien entre l’âge et la capacité à porter une boîte de munitions ? », a demandé Me Bourgon.
« Oui, une personne qui doit porter une arme et une boîte de munitions ne peut avoir moins de 18 ans », a répondu M. Ntaganda.Ntaganda a déclaré que les dortoirs des recrues de sexe féminin étaient situés à 100 m de ceux occupés par leurs confrères masculins. Il a ajouté que des officiers et une infirmière leur avaient été assignés qui étaient « responsables de leur protection ».
Ntaganda a indiqué qu’il ne pouvait se souvenir de l’effectif féminin de l’UPC mais « qu’elles étaient peu nombreuses ». Hormis le fait de servir dans la garde personnelle des commandants et des autres missions assignées, certaines assuraient les fonctions d’instructeurs au camp d’entraînement de Mandro.
Le témoignage de M. Ntaganda d’aujourd’hui contredit les éléments de preuve présentés par l’accusation. L’année dernière, un ancien membre de l’UPC a témoigné que les commandants de la milice avaient violé des recrues de sexe féminin. Un autre ancien membre a témoigné que les femmes militaires n’étaient pas en mesure de repousser les avances sexuelles de leurs supérieurs de l’UPC.
Les procureurs de la CPI accusent M. Ntaganda de nombreux crimes, notamment de viol, d’esclavage sexuel, d’enrôlement et de conscription d’enfants soldats de moins de 15 ans ainsi que de leur utilisation pour participer activement à des hostilités. Il est également accusé d’attaque contre des civils, de pillage, de meurtre et de déplacement de civils. Il nie les crimes, qui auraient été commis en 2002 et 2003, affirmant qu’il ne s’était battu que pour la paix et le retour des civils déplacés dans leurs maisons.
Il s’agit de la cinquième journée de M. Ntaganda à la barre des témoins. Il poursuivra son témoignage jeudi matin.