Les audiences du procès de Bosco Ntaganda qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI) se sont déroulées en majeure partie à huis clos depuis que l’accusé a conclu son témoignage pour sa propre défense. Le témoignage des trois personnes ayant déposé après M. Ntaganda, via un lien vidéo, a été entendu majoritairement à huis clos.
Lundi, le témoin D201, supposé être un ancien directeur d’une école du district d’Ituri, au Congo, a témoigné sur les taux de fréquentation des écoliers lors du conflit ethnique qui s’est déroulé dans la région en 2002 et 2003. On ignore dans quelle école le témoin a travaillé et quel est le lien entre son témoignage et les charges retenues à l’encontre de M. Ntaganda.
Plus tôt dans la journée de lundi, le témoin D057 avait également témoigné, en grande partie à huis clos. Cette personne semble également avoir été un membre du personnel d’une école anonyme située en Ituri à l’époque où M. Ntaganda et ses combattants de l’Union des patriotes congolais (UPC) auraient commis différents crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Parmi les 18 chefs d’accusation pour lesquels M. Ntaganda est jugé figurent le viol, l’esclavage sexuel d’enfants soldats ainsi que l’enrôlement et la conscription d’enfants soldats de moins de 15 ans et leur utilisation pour participer activement à des hostilités. En juin dernier, le témoin de l’accusation P190 a témoigné que M. Ntaganda avait enlevé des enfants dans une école primaire pour garçons et les avait enrôlés dans l’UPC. Le témoin a affirmé que M. Ntaganda avait dirigé un groupe de soldats lors d’un raid sur une école de Muzipela et enlevé un nombre non spécifié d’enfants qu’il avait enrôlés dans la milice.
On ne sait pas si les dépositions du témoin D201 et du témoin D057 étaient liées à l’enlèvement présumé d’enfants dans l’école de Muzipela. Des registres scolaires ont été précédemment utilisés par la défense pour contester l’âge auquel les témoins prétendaient avoir été des enfants soldats qui avaient rejoint des groupes rebelles.
Dans son témoignage, M. Ntaganda a déclaré que l’UPC examinait ses recrues pour éliminer les personnes qui ne répondaient pas leurs exigences comme celles qui étaient mineures. Il a indiqué que les recrues jugées trop jeunes pour servir dans le groupe étaient renvoyées dans leurs familles.
Dans une demande du 17 août 2017 pour entendre le témoignage des témoins D201 et D057 via un lien vidéo, les avocats de la défense ont affirmé que ces témoins devaient « confirmer un nombre très limité de faits particuliers » lors d’un interrogatoire direct ne durant pas plus d’une heure. La défense a également indiqué qu’un témoignage à distance pourrait diminuer la durée de leur absence au travail et « réduire les dangers » pouvant résulter de leur participation au procès dans le cas où elle serait connue.
Entretemps, vendredi dernier, les juges ont entendu le témoignage de Richard Bahati Zawadi, apporté également via un lien vidéo, depuis Bunia, une ville congolaise. Comparaissant sans aucune mesure de protection, M. Zawadi a témoigné sur son entraînement à l’école militaire de Kyankwanzi, en Ouganda, où des centaines de recrues rebelles congolaises avaient été entraînées par l’armée ougandaise.
Le procès Ntaganda avait précédemment entendu que des enfants soldats congolais avaient été entraînés à Kyankwanzi. Selon l’accusation, en août 2000, l’armée ougandaise avait transporté par voie aérienne près de 700 combattants de milices congolaises pour les entraîner dans deux écoles militaires en Ouganda. Les recrues entraînées auraient compris jusqu’à 163 enfants, certains ayant moins de 18 ans et d’autres moins de 15 ans, dont quelques-uns étaient ensuite partis servir dans l’UPC.
L’accusation a fourni des éléments de preuve montrant que, à l’époque, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) avait déployé des efforts pour garantir la démobilisation de 163 recrues mineures qui étaient à Kyankwanzi.
Lors de l’interrogatoire mené par l’avocat de la défense Christopher Gosnell, M. Zawadi a déclaré qu’il n’avait pas pu donner sa date de naissance aux fonctionnaires de l’UNICEF qui avaient visité le camp d’entraînement. « Lorsque nous y sommes arrivés, nous étions très jeunes, ils nous ont demandé d’où nous venions. Puis, ils nous ont pris en photo », a rappelé le témoin. Il a ajouté que, lorsqu’ils étaient arrivés à Kyankwanzi, il n’était pas sûr de savoir à quelle milice il appartenait, bien que l’on lui ait donné plus tard un uniforme militaire qui indiquait qu’il était un membre de l’Armée populaire congolaise (APC). L’APC et l’UPC figuraient parmi les groupes rebelles congolais dont les combattants étaient entraînés dans un camp militaire ougandais.
Ntaganda, un ancien chef adjoint de l’état-major de l’UPC, est jugé devant la Cour basée à La Haye pour 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, dont le meurtre, le viol, l’esclavage sexuel, le pillage et l’utilisation d’enfants soldats. Les crimes présumés, que M. Ntaganda nie, ont été commis dans la province d’Ituri, au Congo, en 2002 et 2003.
Thomas Lubanga, le chef de l’UPC, a été la première personne à être condamnée par la CPI. Il purge actuellement une peine de prison de 14 ans pour le recrutement, l’enrôlement et l’utilisation d’enfants de moins de 15 ans dans un conflit armé.
Les audiences du procès Ntaganda devraient se poursuivre jeudi, le 23 septembre 2013, avec la déposition d’un nouveau témoin de la défense.