La Chambre d’appels de la Cour pénale internationale (CPI) sollicite les avis d’experts du droit international humanitaire et du droit pénal sur l’appel du procureur contre certains aspects de la condamnation de Bosco Ntaganda. Les experts doivent exprimer leur intérêt à fournir des observations le 14 août 2020 au plus tard.
L’année dernière, la Chambre de première instance VI a condamné Ntaganda pour les 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité retenus par le procureur. Cependant, le procureur a fait appel d’une partie de la décision de condamnation, dans laquelle la chambre de première instance avait acquitté Ntaganda de la responsabilité des attaques contre une église à Sayo et un hôpital de la ville de Mongbwalu.
Selon l’accusation, si ces incidents peuvent sembler relativement mineurs, étant donné la gravité et la variété des comportements pour lesquels Ntaganda a été condamné, ils illustrent des questions importantes de principe juridique. À ce titre, l’accusation soutient que la confirmation et la clarification du droit sur ces points « ne seront pas seulement d’une importance générale pour la pratique de cette Cour, mais contribueront à une meilleure protection des victimes des conflits armés dans le monde ».
Le procureur a demandé aux juges d’appel d’inverser les conclusions de la chambre de première instance que l’attaque de la milice de Ntaganda contre l’église et l’hôpital ne relevait pas de l’article 8(2)(e)(iv) du statut du tribunal; condamner Ntaganda pour ces incidents; et d’ajuster sa peine en conséquence. L’article8(2)(e)(iv) spécifie le crime de guerre « diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades ou des blessés sont rassemblés, à condition qu’ils ne soient pas des objectifs militaires ».
Dans la décision de condamnation , la chambre de première instance avait estimé que le pillage de l’hôpital de Mongbwalu n’était pas un « acte de violence contre l’adversaire » et ne constituait donc pas une attaque au sens de l’article 8(2)(e)(iv). La chambre de première instance avait estimé également que l’attaque contre l’église ayant eu lieu après que les combattants de Ntaganda aient attaqué le village de Sayo et non pendant la conduite effective des hostilités, les éléments de l’article 8(2)(e)(iv) n’étaient pas réunis.
Le procureur a fait valoir que la chambre de première instance avait mal interprété l’article 8(2)(e)(iv) en ne reconnaissant pas les principes mettant l’accent sur la protection accordée aux objets culturels tels que l’église de Sayo et à l’hôpital de Mongbwalu et les lieux où sont rassemblés des malades et des blessés.
Dans une ordonnance rendue la semaine dernière, la Chambre d’appel a noté que, dans son appel, le procureur soulève une question juridique liée à la signification du terme « attaque » à l’article 8(2)(e)(iv) qui peut avoir des implications au-delà du cas d’espèce. En conséquence, la Chambre d’appel a considéré souhaitable de recevoir des observations d’experts en droit international humanitaire et droit pénal. Ceux qui souhaitent fournir des observations devraient exprimer leur intérêt au Greffier de la Cour, en indiquant leur expertise et en fournissant des conclusions sommaires sur les questions qu’ils veulent traiter.
La chambre a précisé les questions principales à traiter comme suit:
Comment le terme « attaque » est-il défini en vertu du droit international humanitaire, en particulier dans le contexte des biens culturels et des hôpitaux ? Quelles sont les différences entre les concepts « d’attaque », de « conduite des hostilités » et « d’action de combat » ? Quelle est la différence entre « attaque » et « acte d’hostilité »?
Que signifie le terme « attaque » à l’article 8(2)(e)(iv) du Statut de Rome ? Couvre-t-il des actes tels que le pillage et la destruction ? Couvre-t-il des actes commis au cours d’une opération de ratissage, effectuée peu de temps après la prise de pouvoir d’une ville ? En raison des circonstances actuelles liées à la pandémie de la COVID-19, la chambre précisera une procédure pour recevoir les observations des experts – par écrit ou lors d’une audition, y compris à travers une participation virtuelle si nécessaire. L’audience sur l’appel du procureur et sur les appels de Ntaganda contre la condamnation et la peine ont été suspendus indéfiniment le mois dernier en raison de la situation COVID-19.
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