Cette semaine, cinq victimes de crimes qui auraient été commis par Bosco Ntaganda et sa milice ont présenté leurs vues et préoccupations aux juges de la Cour pénale internationale (CPI). Apportées aux juges via un lien vidéo, les présentations des victimes se sont limitées à une discussion sur les préjudices qu’elles ont subis.
Les personnes qui ont témoigné cette semaine, à savoir les victimes a/01635/13, a/30169/15, a/30286/15, a/20018/14 et a/20126/14 figurent parmi les neuf victimes que les juges ont autorisé à présenter leurs vues et préoccupations ou leur témoignage au procès. Les victimes a/30012/15, a/30365/15 et a/00256/13 apporteront leur témoignage entre le 10 et le 13 avril 2017. La victime a/00256/13 devrait témoigner via un lien vidéo tandis que les deux autres victimes comparaitront au siège de la Cour située à La Haye.
La victime a/01243/13, qui devait également présenter ses vues aux juges cette semaine, n’a pas comparu. Dmytro Suprun, un des avocats représentant les victimes, n’a pas mentionné la raison de son absence en audience.
Les avocats représentant les victimes ont demandé à ce que huit victimes présentent leur témoignages et que quatre d’entre elles présentent leurs vues et préoccupations. Les juges ont cependant refusé d’entendre le témoignage de trois des personnes proposées. Concernant la victime CLR2-1, les juges ont déclaré que bien que son témoignage avait une « incidence potentielle » sur les charges portées à l’encontre de M. Ntaganda, il était inapproprié de l’entendre puisque l’accusation avait appelé « plusieurs témoins » qui avaient fait une déposition sur les mêmes questions. Les juges ont refusé d’entendre, pour les mêmes motifs, le témoignage de la victime a/00045/13 et de la victime a/30287/15.
Selon l’article 68(3) du Statut de Rome de la Cour, lorsque les intérêts personnels des victimes sont concernés, la Cour permet que leurs vues et préoccupations soient exposées et examinées, à des stades de la procédure qu’elle estime appropriés. La pratique mise en place pour les victimes à la CPI afin qu’ils effectuent leurs présentations, ou qu’elles apportent leurs témoignages, juste après la clôture de la présentation des moyens de l’accusation.
Dans son témoignage, la victime a/20018/14 a déclaré qu’elle avait été violée par deux soldats de l’Union des patriotes congolais (UPC) en présence de ses enfants âgés de dix, huit et six ans. De même, la victime a/30286/15 a raconté qu’elle avait été violée par trois soldats de l’UPC lorsqu’elle avait treize ans.
La victime a/20126/14 a indiqué que les soldats de l’UPC avaient attaqué son village de Nyangara, détruit plusieurs maisons, tué des membres de sa famille et l’avaient poignardé à l’aide d’une baïonnette. « Mon frère a été tué. Il a été massacré à la machette », a déclaré la victime, la seule à s’adresser aux juges sans mesures de protection. Elle a précisé que les soldats avaient également abattu son oncle et tué trois autres parents proches. « Ce jour-là, toutes les maisons des alentours de Nyangara ont été incendiées. Près de cinq villages ont été entièrement brûlés », a-t-il ajouté.
Toutes les victimes ont affirmé que si M. Ntaganda était déclaré coupable, elles souhaitaient obtenir des réparations. La victime a/30286/15, plus spécialement, a indiqué qu’elle aimerait comme réparations que sa maison soit reconstruite. Elle souhaiterait également obtenir une aide pour l’éducation de ses enfants.
Bien que les avocats de M. Ntaganda ne se soient pas opposés à la présentation des vues et des témoignages des victimes, ils ont suggéré que les victimes qui comparaissaient devant les juges ne devaient pas aborder les préjudices qu’elles avaient, ainsi que leurs proches, subis. Elles ont ajouté que si les juges autorisaient des questions qui dépassaient ce cadre, une divulgation complète devrait être effectuée pour l’ensemble des documents se rapportant à ces victimes, les victimes devant prêter serment et être soumises à un contre-interrogatoire.
Les juges ont partagé l’avis de la défense en déterminant le sujet et les limites des présentations des victimes. Par conséquent, les victimes qui comparaissaient cette semaine n’ont été interrogées que par leurs avocats et par les juges.
Ntaganda, l’ancien chef adjoint d’état-major de l’UPC est accusé de meurtre, de viol, d’esclavage sexuel, de pillage et d’utilisation d’enfants soldats, entre autres crimes. Les crimes présumés ont été commis à l’encontre de la population civile Hema en Ituri, une province du Congo, lors d’un conflit ethnique en 2002-2003. M. Ntaganda a plaidé non coupable.