Les juges de première instance ont rejeté les demandes de l’accusation d’appliquer une série de restrictions à Bosco Ntaganda lors de son prochain témoignage devant la Cour pénale internationale (CPI). Ils ont décidé que les mesures suggérées par l’accusation n’étaient pas nécessaires ou n’étaient pas exécutoires.
Les juges ont, entre autres, refusé d’interdire à M. Ntaganda de rencontrer ses avocats pendant son témoignage qui devrait durer jusqu’à six semaines. Les juges ont également refusé d’ordonner aux avocats de M. Ntaganda d’intimer aux témoins de la défense de ne pas regarder de quelque manière que ce soit le témoignage de l’accusé.
Ntaganda, un ancien commandant rebelle de la République démocratique du Congo, se présentera à la barre des témoins pour sa propre défense le mercredi 14 juin. Jusqu’à présent, seul un témoin a témoigné pour la défense, qui a indiqué avoir prévu plus de 100 témoins. Les avocats de la défense ont soutenu que le fait que l’accusé apporte son témoignage à cette phase raccourcirait la présentation des moyens de la défense.
Selon une décision du 8 juin, les juges n’ont pas considéré que le protocole de préparation des témoins de la Cour, qui permet à la partie appelante d’évaluer et de préciser la déposition du témoin, s’appliquait au témoignage de l’accusé, par rapport à un témoin qui avait des contacts limités avec la partie appelante. Ils ont ensuite décidé que, puisque les consultations de M. Ntaganda avec ses avocats étaient soumises au secret professionnel, il ne serait pas approprié d’appliquer le protocole à ces réunions de préparation de son témoignage.
Dans une demande déposée le mois dernier, le procureur de la CPI Fatou Bensouda a demandé aux juges de contrôler que les séances de préparation pour M. Ntaganda soient enregistrées et que les registres et les notes de préparation soient divulgués à l’accusation. La défense a répliqué que les consultations entre M. Ntaganda et ses avocats étaient protégées par le secret professionnel et qu’il serait inapproprié de demander l’enregistrement ou la divulgation du contenu de ces discussions.
Les juges ont également rejeté une proposition de l’accusation sollicitant que la Chambre ordonne à la défense d’informer ses témoins qui comparaitront après M. Ntaganda de ne pas écouter, regarder ou de toute autre manière suivre le témoignage de M. Ntaganda jusqu’à ce qu’il ait conclu son témoignage.
« La Chambre estime que, à la lumière des problèmes d’application associés à cette phase de la demande de l’accusation, il n’est pas approprié ou réalisable de rendre une telle ordonnance », ont statué les juges. Ils ont considéré qu’il était suffisant que l’accusation ait la possibilité de contre-interroger les témoins de la défense sur leur niveau de connaissance du témoignage de l’accusé.
Les juges ont également conclu que les communications entre M. Ntaganda et sa défense pouvaient être maintenues pendant la totalité de son témoignage. Ils ont toutefois ajouté que ces communications devraient toujours être appropriées, dans le sens où les avocats n’étaient pas autorisés à conseiller M. Ntaganda sur la manière dont il devait répondre à une question ou à une série de questions. Ils ont ajouté que refuser tout contact de M. Ntaganda avec ses avocats pendant la totalité de son témoignage empièterait sur ses droits fondamentaux et qu’ils ne considéraient pas qu’il s’agissait d’une mesure proportionnée pouvant empêcher que son témoignage ne soit indûment influencé.
Les juges ont également rejeté une suggestion de l’accusation pour que des parties du témoignage de M. Ntaganda soient entendues en séance à huis clos afin de ne pas influencer les témoins à venir. La défense s’y est opposée, soutenant que M. Ntaganda souhaitait témoigner en public et que, à part deux sujets particuliers, la défense visait à ce que la totalité de son témoignage soit donnée en séance publique. Les juges ont conclu qu’il n’y avait « aucune raison valable » d’accéder à la proposition de l’accusation mais ils ont ajouté qu’ils statueraient sur tout demande de poursuivre une séance à huis clos au cours de son témoignage.
Néanmoins, les juges ont accédé à une demande de l’accusation, à laquelle la défense ne s’est pas opposée, à savoir interdire à M. Ntaganda de parler de son témoignage à des contacts non soumis au secret professionnel. Les juges ont souligné que cette ordonnance était applicable à tous les témoins précédents et qu’il devrait être également exclu que M. Ntaganda puisse débattre de son témoignage avec des contacts non soumis au secret professionnel.
Les juges ont également accédé à une demande de l’accusation selon laquelle les réponses apportées par M. Ntaganda pouvaient être utilisées à son encontre et que, s’il refusait de répondre à une question acceptable, il était approprié que les juges puissent en tirer une conclusion défavorable. Les juges ont souligné que, comme la défense l’a reconnu, une fois qu’un accusé témoigne volontairement sous serment, ils renonçaient à leur droit de garder le silence et l’accusé devait répondre à toutes les questions qui lui étaient posées.
International Justice Monitor suivra la totalité du témoignage de M. Ntaganda. Pour obtenir des informations supplémentaires, veuillez visiter notre fiche d’information de deux pages.