Après la condamnation et le prononcé de la peine de Bosco Ntaganda, la juge Ozaki a quitté la Cour pénale internationale (CPI). Depuis mars dernier, la juge Ozaki siégeait en tant que juge à temps partiel au sein de la Chambre de première instance VI qui a jugé l’ancien commandant rebelle congolais. La Présidence de la Cour a désigné la juge Olga Herrera Carbuccia pour la remplacer au sein de la Chambre de première instance.
Les six derniers mois du mandat de la juge Ozaki à la Cour ont suscité quelques controverses puisqu’elle a exercé sur une courte période les fonctions de juge à la CPI et celles d’ambassadrice du Japon en Estonie. Les avocats de M. Ntaganda affirment que, lors de la procédure, la juge a violé le règlement de la CPI relatif à l’indépendance judiciaire et que, par conséquent, la condamnation de M. Ntaganda est invalide. Toutefois, les juges de la Cour ont antérieurement rejeté des arguments similaires de la défense, concluant que les actes de la juge Ozaki ne constituaient pas une violation des règles de la Cour.
La juge Ozaki siégeait à la Chambre de première instance VI depuis sa constitution en 2014. Bien que son mandat en tant que juge de la CPI se soit conclu le 10 mars 2018, elle est restée en fonction jusqu’à la conclusion du procès Ntaganda. Conformément à l’article 36(10) du Statut de Rome, un juge affecté à une chambre de première instance doit rester en fonction pour conclure tout procès ou appel dont les audiences ont déjà commencé.
De plus, l’article 35(3) du Statut de Rome de la Cour prévoit que, en fonction de la charge de travail de la Cour, la Présidence peut décider périodiquement de la mesure dans laquelle ceux-ci sont tenus d’exercer leurs fonctions à plein temps. En annonçant la nouvelle composition de la Chambre de première instance VI, le président de la Cour, le juge Chile Eboe-Osuji, a souligné que le mandat de la juge Ozaki « avait réellement pris fin » le jour où la décision sur la peine de M. Ntaganda avait été rendue.
Avant de rejoindre la CPI en janvier 2010, la juge Ozaki exerçait les fonctions de directrice de la Division des traités de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, d’après sa biographie publiée sur le site web de la CPI. Elle avait occupé précédemment pour le gouvernement japonais plusieurs postes de direction.
Pour justifier son allégation selon laquelle la juge Ozaki doit être récusée, la défense a cité l’article 41(2), qui prévoit que les juges n’exercent aucune activité qui soit incompatible avec leurs fonctions judiciaires ou qui fasse douter de leur indépendance.
Pour sa défense, la juge Ozaki a déclaré en mai dernier que la demande de la défense ne renfermait pas les motifs substantiels pour satisfaire aux exigences requises pour une récusation. Elle a également affirmé que les circonstances de sa nomination en tant qu’ambassadrice ne violaient pas le Statut de Rome.
En rejetant la demande de récusation de la juge Ozaki, une majorité de juges a considéré que la demande de récusation n’avait pas démontré que les circonstances du mandat de la juge Ozaki en tant qu’ambassadrice avaient atteint « le seuil élevé requis pour réfuter une présomption d’impartialité ». En outre, une majorité a également affirmé que la défense n’avait pas démontré une apparence de partialité raisonnable dans le procès Ntaganda résultant des circonstances relatives à la nomination, au poste d’ambassadrice ou à la démission du poste diplomatique de la juge Ozaki.
Tous les juges ayant participé à la réunion en plénière et qui se sont prononcés sur la demande ont rejeté la demande de récusation, à l’exception de quatre juges de la Section d’appel qui se sont abstenus puisqu’ils ont considéré que leur participation pouvait les placer devant un conflit d’intérêt potentiel découlant de leurs responsabilités en tant que juges de la Section d’appel. Il s’agit des juges Chile Eboe-Osuji, Howard Morrison, Luz del Carmen Ibáñez Carranza et Solomy Balungi Bossa.
Les juges qui ont voté le rejet de la demande sont Marc Perrin de Brichambaut, Olga Herrera-Carbuccia, Antoine Kesia-Mbe Mindua, Bertram Schmitt, Peter Kovács, Raul Cano Pangalangan, Tomoko Akane, Reine Alapini-Gansou, Kimberly Prost et Rosario Salvatore Aitala. La décision ne mentionne pas les juges Robert Fremr, Geoffrey Henderson, Piotr Hofmański, Chang-ho Chung et Cuno Tarfusser qui figurent parmi ceux qui n’ont pas siégé ou qui se sont abstenus.
M. Ntaganda a jusqu’au 14 janvier 2020 pour déposer le dernier de ses arguments. Entretemps, le juge Chang-ho Chung a été nommé juge unique pour la phase des réparations du procès.