Les procureurs de la Cour pénale internationale (CPI) ont demandé aux juges de ne pas libérer Bosco Ntaganda, le chef militaire congolais qui répond à 18 chefs d’accusation devant le tribunal international.
Ils ont soutenu qu’un maintien en détention était nécessaire pour garantir sa comparution devant la Cour ainsi que la sécurité des témoins avant le procès.
« M. Ntaganda continue d’avoir de l’influence et bénéficie d’un solide soutien au Congo. Étant donné la gravité des charges retenues à son encontre et son passé de violence, le risque que l’accusé exerce des pressions et des intimidations sur les témoins est majoré s’il est libéré », a déclaré le substitut du procureur Nicole Samson.
Mme Samson s’exprimait lors d’une audience convoquée jeudi pour recueillir des observations sur l’examen périodique de la libération ou du maintien en détention de l’accusé. Les juges ont demandé des observations sur toute modification des circonstances depuis la décision antérieure relative à la détention de M. Ntaganda.
Selon Mme Samson, la décision de confirmation des charges de juin 2014 et la décision d’octobre 2014 fixant la date d’ouverture du procès au 2 juin 2015 seraient susceptibles de permettre à M. Ntaganda de fuir. Elle a ajouté que la probabilité de fuite était augmentée du fait de la condamnation et de la peine de 14 ans de prison infligées à Thomas Lubanga pour « seulement une partie des charges » portées à l’encontre de M. Ntaganda.
Le 18 mars 2013, M. Ntaganda s’est rendu à l’ambassade américaine au Rwanda et a demandé à être transféré à La Haye où deux mandats d’arrêt avaient été délivrés à son encontre. Le premier mandat d’arrêt, émis en 2006, alléguait que M. Ntaganda, avec M. Lubanga, avait recruté, enrôlé et utilisé des enfants soldats dans un conflit armé en 2002 et 2003.
L’ancien sous-chef d’état-major des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC) répond à 18 chefs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, qui auraient été commis par lui-même et par ses troupes en Ituri, une province du Congo.
Les avocats représentant les victimes au procès ont souligné que « jamais auparavant un accusé n’avait répondu à autant de charges » devant la CPI. Ils ont indiqué que les victimes avaient fait part de leurs craintes quant à leur sécurité et à la stabilité de la région si l’accusé était libéré. Le maintien en détention de M. Ntaganda était par conséquent « plus nécessaire que jamais ».
L’avocat de la défense Stéphane Bourgon a déclaré qu’il n’avait aucune observation à faire concernant les modifications de circonstances. Il a cependant fait remarquer que les observations des procureurs et des avocats des victimes n’étaient pas des modifications de circonstances mais des questions qui avaient fait l’objet de litiges et avaient été abordées par le passé.
Bourgon a affirmé que M. Ntaganda mesurait pleinement la gravité des charges retenues à son encontre et était prêt à les contester lors du procès.
Il a indiqué que, bien qu’il soit exact que l’accusé ait eu accès aux éléments de preuve et aux identités des témoins, il avait eu ces informations avant la décision de confirmation. M. Bourgon a ajouté : « Il ne s’agit pas d’une modification des circonstances qui affecterait le fait qu’il doive ou non rester en détention provisoire ».
Bourgon a déclaré que les allégations selon lesquelles son client exerçait une influence au Congo étaient basées sur « des rumeurs et sur la valeur probante accordée à des témoignages anonymes ».
Le juge président Robert Fremr a déclaré que la chambre rendra sa décision sur cette question d’ici le 14 novembre 2014.