Le procès de Bosco Ntaganda pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité qui se tient devant la Cour pénale internationale (CPI) ne devrait pas débuter avant juin 2015 en raison des enquêtes de l’accusation qui sont en cours.
Selon les demandes faites lors de la conférence de mise en état de jeudi matin, les enquêtes ne devraient pas être finalisées avant la fin du mois de janvier 2015. La divulgation intégrale des éléments de preuve à la défense ne devrait pas intervenir avant mars 2015.
Ntaganda, l’ancien sous-chef d’état-major présumé des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), a été renvoyé en jugement devant la Cour en juin dernier. La chambre préliminaire II a conclu qu’il existait des motifs substantiels de croire qu’en 2002 et 2003, les troupes appartenant aux FPLC avaient commis des crimes sur la population civile de la province d’Ituri, en République démocratique du Congo.
Dans une demande écrite relative au calendrier prévisionnel de la conférence de mise en état, le Bureau du Procureur (BdP) a proposé le mois de juin 2015 comme étant « une date réaliste pour l’ouverture du procès ». Il a expliqué que c’était lors des phases avancées de divulgation des éléments de preuve, notamment des identités des témoins à la défense, et de conduite « d’enquêtes ciblées » que l’on recueillait des preuves complémentaires.
À ce jour, l’accusation a communiqué l’identité de 38 témoins sur la déposition desquels elle s’est appuyée lors de la phase de confirmation des charges. Les identités de neuf autres témoins et de tout autre témoin complémentaire sur les dépositions desquels l’accusation a l’intention de s’appuyer lors du procès devraient être divulguées dans les mois à venir.
Selon le Substitut du Procureur Nicole Samson, l’équipe cherche actuellement à localiser un nombre non communiqué de ses témoins afin de rétablir avec eux un contact et prévoit de respecter ses obligations de divulgation intégrale au moins trois mois avant la date du procès.
Le BdP a également affirmé qu’il attendait les réponses aux demandes de levée des restrictions sur les documents et informations obtenues sous la condition qu’ils demeurent confidentiels.
L’avocat nouvellement désigné de M. Ntaganda, Stéphane Bourgon, a fait valoir que « l’insuffisance d’informations » sur la liste finale de témoins que l’accusation avait l’intention d’appeler était « inquiétante ». Ce qui a provoqué une surcharge de travail et peu avoir un impact potentiel sur la stratégie de la défense.
« Les informations divulguées jusqu’à présent conduisent à conclure que, d’ici mars 2015, il est probable que la liste sera différente de celle que nous avons aujourd’hui », a déclaré M. Bourgon. Il a ajouté que les déclarations des témoins identifiés ainsi que les sujets et questions sur lesquels ils témoigneront n’ont pas non plus été communiqués.
La défense a également exprimé ses inquiétudes concernant les témoins experts, affirmant que les procureurs n’avaient pas fourni les informations sur leur nombre total ou sur le calendrier de remise de leurs rapports. L’accusation a l’intention d’appeler des témoins experts sur le contexte historique de l’affaire, la violence sexuelle, les traumatismes, l’imagerie satellite et la médecine légale, entre autres.
Mme Samson a déclaré à la chambre que des dispositions avaient été prises afin d’utiliser les rapports d’expert du procès de Thomas Lubanga, l’ancien président des FPLC qui était à l’origine inculpé avec M. Ntaganda en 2006. M. Lubanga a été déclaré, en 2012, coupable d’utilisation d’enfants soldats et a été condamné à 14 ans de prison. Il a fait appel de sa condamnation et de sa peine.
Dans leurs observations déposées devant la chambre, les avocats représentants les victimes déclarent que certaines victimes ont attendu le procès pendant plus de 11 ans et il était de leur intérêt de débuter les procédures le plus rapidement. Jusqu’à maintenant, le Greffe de la Cour a reçu 2 000 demandes de victimes souhaitant participer au procès. Plus de 400 demandes environ devraient être déposées dans les prochains mois. Actuellement, 1 120 demandeurs se sont vus accorder un statut de participant.
Les autres questions seront traitées lors de la conférence de mise en état, notamment les langues utilisées au cours de la procédure. Le BdP a indiqué que ses témoins déposeront en anglais, en français, en swahili et en lingala et kilendu, des langues congolaises. Toutefois, la langue préférée par l’accusé pour communiquer est le kinyarwanda. Il a une connaissance de base du français et aucune de l’anglais.
La défense a l’intention de procéder à un examen complet des documents de l’accusation et de faire une demande pour les traductions nécessaires d’ici la fin d’octobre 2014.
Un ensemble de conférence de mise en état devrait se tenir dans les mois à venir pour que les parties fassent le point sur les progrès réalisés. La première d’entre elles est provisoirement prévue pour octobre 2014. Les juges Robert Fremr (président), Kuniko Ozaki et Geoffrey Henderson rendront ensuite une décision sur la date du procès.